Yves Bertoncini : « Donner l’impression que notre relation bilatérale est équilibrée »

L’équipe de ministres et de conseillers qui entourent le président Emmanuel Macron prouve, avant tout, son europhilie. Ensuite, il se trouve que plusieurs membres de cette équipe parlent la langue de Goethe. Cela peut être le résultat d’un parcours familial, comme c’est le cas pour le premier ministre dont le père travaillait à Bonn. Cela peut être un choix personnel, comme pour Sylvie Goulard, qui est aussi une italophile. Cela résulte enfin d’une carrière, dans le cas du conseiller diplomatique du président, ambassadeur à Berlin, il y a peu.

Il est certain que cette équipe permettra de mieux comprendre l’Allemagne et de mieux lui parler. C’est nouveau. Au début de leur mandat, Nicolas Sarkozy avait tenté de se rapprocher de la Grande-Bretagne puis François Hollande avait songé à une alliance avec les pays européens du Sud. Mais la vraie rupture qu’apporte le président français ne me paraît pas se situer dans les relations avec l’Allemagne. La vraie rupture, elle est en France, contre le franco-scepticisme. Son message est de dire « on va y arriver ! », à la manière de la chancelière allemande au moment de l’accueil des réfugiés syriens.

Le défi du nouveau chef de l’État est de montrer que baisser le chômage et revenir à un déficit public inférieur à 3 % est bon pour les Français, avant d’être bon pour les relations avec l’Allemagne. Le danger est que l’action du président soit perçue comme devant, avant tout, plaire à notre voisin. Emmanuel Macron doit donner l’impression que la relation bilatérale est équilibrée, même si, au fond, les Français ressentent bien que leur pays est en situation de faiblesse par rapport à l’Allemagne sur les sujets économiques, sociaux et budgétaires.

Un second piège à éviter est de donner l’impression de copier les réformes allemandes. Ce n’est pas pertinent sur le fond. Les pays nordiques sont un autre exemple tout à fait intéressant de redressement. Nous pouvons avoir notre propre voie.

Emmanuel Macron plaît. Son charme a joué en Allemagne, même si notre pays enregistre là-bas un déficit de confiance. Mais le nouveau président possède, pour l’instant, une sorte d’effet placebo, terme qui veut dire « je plairai ». Il faudra quelques mois pour juger si les vrais remèdes, et non des placebos, sont administrés par son équipe.

Le moteur franco-allemand peut être utile pour renforcer notre sécurité collective, en matière militaire ou de terrorisme. En cela, la nomination de Sylvie Goulard aux armées est une bonne chose. Mais ce moteur franco-allemand est efficace lorsque le capot est baissé. Je m’explique : quand il est voyant, il irrite nos partenaires, notamment en Italie, au Benelux ou dans les pays d’Europe centrale et orientale.

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